..le chemin était tracé.. griffonné à la mine d'un crayon sans doute.. la teinte sentait la poussière.. une main avait porté tant de lettres, de signes, de virgules sur cette feuille pliée et maltraitée par des êtres bien avant moi.. il y a longtemps tellement longtemps.. tremblante ou pleurant, les noms étaient là, d'une écriture que j'ai déjà vu dans des livres quand j'étais minot.. hésitante, haletante pensante aimante à la mine d'un crayon.. en prenant soin de n'oublier personne, personne.
Comme si sa vie en dépendait. Comme si elle avait attendue ces moments.. ne faisant que ca retraçant celle des autres, leur vie. L'arbre était composé de parcelles remplies de noms, plein de noms, de dates, de points d'interrogation pour certaines. Les dates me donnaient le vertige lorsque mes yeux remontaient doucement vers le haut de cette page brunie par le temps.. car vieillissantes, les dates.
Escalade de vies antérieurs, recul dans un monde inconnu, le mien par destination. Allongé, je me suis pris dans ce dédale de noms, prénoms. Me suis cherché et.. ai vu mon prénom inscrit d'une autre main moins tremblante.. avec cette même précision celle de ne point oublier.. quelque part sur cette même feuille.. non loin de mes géniteurs.. vous savez, ceux qui vous font un jour par plaisir, pour certains. Elle m'avait pas épargné.. la main. Une personne avait pensé le faire un jour pour moi.. une date.. ma naissance.. comme morbide.. orpheline d'une autre date celle clôturant mon départ ailleurs qu'ici.
Sur cet arbre je me suis attardé sur des prénoms de jeunes filles.. mes aïeules.. imaginant cette caste féminine, ces beautés, elles.. portant de longues robes de dentelles.. de petits minois maquillés à la poudre de perlinpinpin.. imaginant leurs chignons compliqués arborées de sourirs ravageurs, coquines les soirs de bal.. le coeur battant la chamade sous un chêne entourées de la violence des hommes, la guerre, la famine.
Le mien s'est mis à battre plus fort, ma poitrine s'est soulevée puis, j'ai refermé cet endroit d'un geste de la main.. balayant cet instant.. ce coin de papier.. ces origines à la matière cornée trouvée là dans ce tiroir de merde ouvert je ne sais pourquoi.. connu de toutes ces femmes elles qui m'ont donné la vie indirectement.. une goutte de sang a perlé de cette feuille.. mon sang.. retournant dans mon monde, je suis resté seul avec ce retour en arrière ma tête prise entre toutes ces entités.
Ce tracé sans âge épousant les lignes de mes mains, épousant les formes de ma vie....
...tracage